Des enseignants de moins en moins nombreux à se présenter aux concours , un recrutement de plus en plus difficile , des classes sans professeur , un recrutement par le biais de Pôle Emploi, des jeunes professeurs malmenés à qui on impose un rythme d’enfer…..bref , des enseignants ayant à faire face à des situations de plus en plus difficiles . Des présidentielles qui approchent et des candidats qu’ils soient de gauche ou de droite promettent une redéfinition du temps de service des enseignants………

Je vous livre la réflexion d’un collègue au cours d’un conseil de classe de seconde . Elle traduit bien cette situation à laquelle ont à faire face bon nombre d’enseignants :

Bien sûr, je vais évoquer dans quelques instants le bilan comptable de cette classe de seconde. Mais avant tout, il est bon de parler de pénibilité du travail, un concept qui prend tout son sens, toute sa dimension dans cette classe. Car cette classe est bel et bien une classe pénible de laquelle on sort totalement épuisé physiquement et nerveusement.

Il faut effectivement faire, à chaque fois, la police pendant 50mn car les élèves discutent à voix haute, s’interpellent pendant l’heure et même s’insultent entre eux quand ils n’insultent pas l’enseignant. On doit sans cesse vérifier que le cours, les corrections d’exercice sont recopiés ! Ils ne vous laissent aucun répit. Tout commence d’ailleurs dès l’appel, où je suis obligé de demander jusqu’à trois fois le silence à chaque fois que je cite le nom d’un élève. Impensable !

C’est la première fois que je suis confronté à une telle situation. Certes, je vieillis mais à ce rythme là je demande à Monsieur le Proviseur de me réserver rapidement une place à la Verrière, haut lieu de la MGEN. Et pourtant ce n’est pas faute d’avoir essayé de discuter avec les élèves. En vain ! Les rappels à l’ordre, les punitions, et les heures de retenue ne suffisent pas. Il faut toujours remettre l’ouvrage sur le métier, toujours repartir de zéro face à un groupe, composé d’une bonne douzaine d’élèves vicieux, adeptes de la mauvaise foi et voulant forcément avoir le dessus sur l’enseignant.
Leur toupet, leur manque de politesse et de respect ne s’arrêtent pas là. Les retards pour des raisons futiles et les absences sont légions sans oublier que certains se permettent même de s’allonger sur les tables pour dormir.
Certes, une séquence a lieu le samedi matin de 8h à 9h. Ceci explique peut-être cela ! Je n’oublie pas le courage qu’ont les AED (assistants d’éducation) pour venir rappeler, à quasiment chaque séquence, à une bonne dizaine d’élèves qu’ils doivent aller régulariser leurs retards ou leurs absences. Mais ceux-ci sont aussi pris à partie : on leur demande des explications, de justifier les convocations….
Pour ces élèves difficiles ,tout est bon pour se faire remarquer ! Alors aujourd’hui, je suis forcément triste. Triste de devoir enseigner dans une telle situation, triste de devoir rentrer dans la classe à reculons, triste de ne pouvoir effectuer que quelques minutes de cours dans une séquence simplement pour empêcher les débordements de tous ordres. Mais surtout triste et révolté pour la moitié des élèves qui aimeraient apprendre, enrichir leurs connaissances et progresser mais qui doivent se taire, accepter et subir en silence la loi et le désordre que veulent imposer certains de leurs camarades. Mais sont-ils vraiment des camarades ? Eux qui n’ont ni la maturité suffisante ni la volonté de respecter au moins des adolescents de leur génération !

Si l’égalité des chances de l’école républicaine, à laquelle nous sommes tous attachés, doit permettre à tous les élèves de bénéficier des mêmes conditions d’apprentissage, ce principe est malheureusement bafoué dans cette classe. Les quelques élèves volontaires subissent continuellement les forfaitures récurrentes de leurs camarades. Peut-on accepter cela plus longtemps ? La classe n’est ni une crèche ni un jardin d’enfants ! Il me paraît plus qu’urgent, après trois mois de tentatives infructueuses, de sévir avec courage et détermination afin d’éviter de sacrifier ceux qui ont compris le sens de l’école et de son utilité. Evidemment, après ce tableau malheureusement noir, parler des résultats scolaires semble presque futile. La moyenne de la classe est de 9.2 avec des notes s’étalant de 3 à 15. 21 élèves soit 60% n’ont pas la moyenne et 13 ont même mois que 8 ! Le travail personnel doit être une expression bannie de leur vocabulaire. Seulement 6 élèves (soit 17%) ont plus de douze de moyenne et seulement trois plus de quatorze. Finalement, dans tous les domaines, ils battent des records ! P.K.'

J’évoquais plus haut les prochaines élections présidentielles . Ces candidats veulent pour la plupart réformer l’école . Sont-ils vraiment conscients de ce malaise profond ressenti par bon nombre d’enseignants , de plus en plus nombreux ? Un candidat , à ma connaissance, semble avoir pris la mesure de la situation . Ecoutons le brièvement :